Connaissez-vous des couples qui refusent de prendre des décisions ensemble?
L’un pourrait demander : « Que devrions-nous manger ce soir? », pour entendre l’autre répondre : « Cela n’a aucune importance. Je te laisse décider. » Ou l’un pourrait dire : « J’aimerais bien passer nos vacances au bord de la mer cet été. Qu’en dis-tu? » Et l’autre pourrait riposter : « Ça ne vaut même pas la peine d’en discuter, puisque nous décidons toujours de faire ce que tu veux! » Ou encore, l’un pourrait dire : « J’aimerais qu’on parle ensemble de nos investissements », pour entendre l’autre répliquer rudement : « Écoute. Toi, prends soin de ton argent, et je prendrai soin du mien. »
Il se peut que ces personnes attribuent leur attitude à leur personnalité — « Je suis tout simplement une personne autonome » —, ou peut-être vont-elles dire qu’elles sont trop occupées pour discuter de tout et de rien, ou peut-être même feront-elles appel à leur état d’adultes — « Nous sommes bien assez mûrs pour prendre nos propres décisions! »
Notre société encourage l’autonomie, et cela a son bon côté. Cependant, il y a aussi un côté négatif à tout cela. Les gens qui refusent de travailler de concert avec leur partenaire pour résoudre les problèmes et planifier leur vie commune pratiquent une forme subtile de violence verbale.
Une forme de violence verbale? Comment ça?
Dans son livre, The Verbally Abusive Relationship (la relation marquée par la violence verbale), Patricia Evan note que les relations saines manifestent certaines qualités telles que le soutien mutuel et le partenariat. Ce soutien mutuel est le fruit de la confiance : nous nous fions assez l’un à l’autre pour partager nos pensées et nos sentiments dans un climat d’amour et de respect mutuels. Vivre comme partenaires, c’est vivre en équipe, en reconnaissant qu’il est plus bénéfique de travailler de concert que de travailler chacun de son côté.
Lorsque nous refusons de participer ensemble à la prise de décisions, nous n’encourageons pas le soutien mutuel et le travail d’équipe. En fait, nous négligeons la relation et la menaçons. Lorsque nous décidons de tout seuls, ou choisissons de ne pas offrir de suggestions lorsque notre partenaire nous demande conseil, nous donnons l’impression à l’autre que ses idées ou ses plans n’ont aucune importance à nos yeux. Il pourrait en déduire qu’il n’a aucune importance à nos yeux. Refuser de discuter ensemble avec notre partenaire, c’est déclarer que nous croyons que sa vie et ses décisions sont sans importance pour nous plus importante que la sienne ou que nous n’avons pas besoin de lui. Il s’agit d’une forme de maltraitance. Tout stratagème utilisé pour éviter de prendre des décisions ensemble nuit à notre relation de couple. Voici quelques stratagèmes communs :
- Refuser de parler en nous éloignant physiquement (le retrait);
- Ignorer les propos de notre partenaire (la sourde oreille);
- Refuser carrément toute discussion (le blocage).
Pourquoi agir ainsi? C’est probablement dans l’espoir de manipuler l’autre et de le dominer; et si c’est le cas, nous réussirons probablement à atteindre notre but. Mais si nous désirons plutôt vivre une relation saine, nous découvrirons que de telles méthodes nuisent à ce but.
Contrat ou alliance?
Nos attentes concernant la relation influencent fortement notre désir d’arriver à des ententes mutuelles. Si nous voyons l’amitié ou le mariage comme étant avant tout un contrat à respecter, nous allons désirer autant d’autonomie que possible. Mais si nous voyons le mariage ou l’amitié comme étant une relation, une alliance, nous verrons toute l’importance de prendre ensemble les décisions.
Voir le mariage ou l’amitié comme un contrat, c’est d’adopter une vision égoïste à leur sujet; c’est croire le mariage ou l’amitié sert à m’offrir le bonheur, le confort, ou une vie meilleure et qu’elles ne doivent pas entraver ma poursuite de ces objectifs. Ceux qui adoptent cette optique des relations humaines se gardent de trop s’y investir, car ils croient que cela n’est pas profitable pour eux. Ce qui les intéresse, c’est ce qu’ils retirent de la relation, et non ce qu’ils peuvent offrir. C’est l’égalité des bénéfices que chacun retire de la relation qui compte à leurs yeux, et non la profondeur de la relation qui les lie l’un à l’autre.
Voir les relations comme des alliances plutôt que des contrats, c’est choisir de se donner à l’autre et de s’engager à former équipe avec lui. C’est voir le couple comme un nous, plutôt qu’un moi + toi. C’est chercher l’unité en s’engageant à demeurer fidèle, en cherchant activement des solutions aux problèmes, et en cherchant par-dessus tout à prendre des décisions ensemble pour le bien commun.
Lorsque nous prenons une décision ensemble comme couple, il est plus probable que nous poursuivrons ce but jusqu’à son accomplissement, qu’il s’agisse d’un repas à préparer, de vacances à planifier ou d’investissements à choisir. Cette façon de faire nous permet de découvrir de plus en plus les valeurs et les espoirs l’un de l’autre. Cela vient fortifier la relation, puisque cela nous encourage à suivre la même voie ensemble. Un expert dans le domaine de la communication qualifie de telles ententes d’actes rédempteurs, puisqu’ils réaffirment notre décision de faire vie commune.
Ententes rédemptrices quotidiennes
Lorsque ma femme et moi étions de jeunes mariés et que nous gagnions tous les deux un petit salaire, nous nous sommes assis ensemble pour dresser un budget commun. Nous avons décidé ensemble ce que nous allions dépenser, donner et épargner. C’est alors que nous avons adopté la règle suivante : nous ne ferions pas d’achats de plus de 50 dollars sans consulter l’autre. Aujourd’hui, la limite est plus élevée, mais le principe demeure — nous allons discuter ensemble de toute dépense qui dépasse cette limite avant de faire l’achat en question.
Il ne s’agit que d’un sujet à discuter. Mais dans la vie, il y a de multiples décisions à prendre ensemble.
De quels sujets pratiques devrait-on discuter? Selon les études, il est profitable pour le couple de venir à s’entendre dans au moins six domaines clés :
1. Des ententes concernant la vie quotidienne :
Il est bon de décider ensemble qui fait la vaisselle, qui fait le ménage, qui paie les factures, qui tond le gazon. Les familles qui s’entendent ensemble sur les responsabilités de chaque membre évitent beaucoup de conflits.
2. Des ententes concernant la communication au sein de la relation :
Il est bon d’adopter des ententes concernant les principes à suivre dans toutes les communications en famille : le niveau de partage, la marche à suivre pour régler les conflits, les façons de se soutenir mutuellement et la satisfaction des besoins sexuels. Les partenaires qui viennent d’arrière-plans très différents en ce qui concerne la communication ont besoin de s’écouter attentivement pour mieux se comprendre et s’adapter l’un à l’autre dans ce domaine. C’est surtout le cas lorsque l’un a vécu au sein d’une famille très ouverte et remplie d’affection, tandis que l’autre vient d’une famille aux tendances contraires.
3. Des ententes concernant les finances :
Il faut décider ensemble qui va gérer le budget; quel pourcentage des revenus sera investi ou épargné; ce que vous dépenserez pour les cadeaux et les fêtes.
4. Des ententes concernant votre entourage :
Il est important d’adopter des ententes claires concernant l’interaction avec la parenté, les sorties, les vacances, les temps libres. Il faut décider ensemble comment vous réagirez envers des personnes difficiles. Il faut décider combien de temps vous voulez passer seuls à la maison, et combien de temps vous voulez consacrer aux autres personnes de votre entourage. Que ferez-vous seul, que ferez-vous avec les autres et que ferez-vous ensemble comme couple?
5. Des ententes concernant votre vie spirituelle :
Allez-vous prier ensemble, fréquenter une église ensemble, servir les autres ensemble? Ma femme et moi aimons beaucoup accueillir les gens de notre assemblée chez nous — c’est une activité qui exige une planification comme couple.
6. Des ententes concernant l’avenir :
Il est important de discuter ensemble de vos plans de carrière et de retraite, des enfants, des vacances, d’un retour aux études.
S’entendre sur de tels sujets exige plus qu’une habileté à bien communiquer. Cela exige aussi une certaine attitude de cœur.
- Parler ensemble des repas à préparer, c’est dire que les idées de l’un et de l’autre sont importantes; c’est reconnaître l’égalité de l’un et de l’autre.
- Parler des vacances, c’est faire preuve de bonne volonté : c’est penser le meilleur de l’autre et chercher son bien ainsi que le sien.
- Prendre le temps de discuter des finances, c’est manifester la confiance l’un envers l’autre.
En choisissant librement de prendre des décisions ensemble, nous manifestons notre désir de vivre une alliance et non un contrat. Nous déclarons que nous voulons nous soutenir mutuellement et travailler de concert pour le bien commun. Nous affirmons que nous voulons suivre la même voie, main dans la main.
On se met d’accord? C’est si beau lorsque c’est le cas.
Auteur de cet article: Bill Strom
Source de la photo: Joshua Ness